Sparkle

Membre des Fous masqués insaisissable et sans scrupules.
Une dangereuse spécialiste dans l'art du théâtre, accro au jeu d'acteur. Portant d'innombrables masques, elle est le personnage aux mille visages.
La richesse, le statut, le pouvoir... rien de tout cela n'a d'importance pour Sparkle. La seule chose qui la pousse à agir, c'est le « jeu ».

La jeune fille, orpheline abandonnée, ne savait pas d'où elle venait ni où elle allait, jusqu'à l'arrivée d'une troupe de théâtre. De loin, elle observa une dame brune avec deux queues de cheval traverser la scène gracieusement comme un poisson. Les divers masques qu'elle portait n'empêchaient ni ses rires ni ses pleurs de captiver le public pendant sa performance, même de loin. Le poisson sauta devant elle, puis replongea, créant des ondulations à la surface de l'eau.

Peu à peu, elle se rendit compte qu'elle regardait le spectacle de sous la scène.

Intriguée, elle continua d'assister aux performances un nombre incalculable de jours, mais depuis le public, jamais sous le feu des projecteurs. Un jour, à la fin d'une représentation, elle se rendit en coulisse, où la dame brune lui tendit un masque.
« Je peux jouer, moi aussi ? »
« Pourquoi pas ? Si tu arrives à faire croire au public que tu es "Sparkle", alors c'est ce que tu es. Allez, en scène. »

Au lever du rideau, qui servait de quatrième mur, la scène faiblement éclairée révéla un trou noir déroutant. Elle savait que le public pouvait la voir et l'entendre même si elle portait un masque. Se rappelant la performance de Sparkle, elle imita ses mouvements, sa voix et son attitude.

« Tu t'es très bien débrouillée pour une première fois. »
« Mais mon imitation... n'était pas parfaite. »
« C'est un détail ça, ce n'est pas un problème tant que personne ne remarque la différence... Au fait, on part demain. La véritable Sparkle, c'est toi ici à présent, pour aussi longtemps que tu le souhaites, et tu peux faire d'elle qui tu veux qu'elle soit. »
Sparkle voulut dire quelque chose, mais la dame lui caressa affectueusement la tête.
« Peu de monde vient nous voir, à part toi. Nous ne sommes qu'une petite troupe et nous n'avons pas pour ambition de devenir célèbres dans tout le cosmos... Je suis heureuse d'avoir rencontré une personne comme toi qui se souviendra d'un personnage insignifiant nommé Sparkle... Ne pleure pas, tu peux garder ce masque. C'est le tien, à présent. »
Sparkle hocha la tête.
« Quand tu portes ce masque, tu peux devenir n'importe qui ou bien encore personne... Si tu aspires vraiment à être actrice, ne te limite pas à cette petite scène. Vise plus haut et explore de nouveaux horizons. »

Dernière descendante du Clan des marionnettes, la fille n'était pas libre de ses choix. Elle était destinée à vivre sa vie en fonction des préceptes du masque, car les marionnettes n'étaient que de simples réceptacles pour les masques.

D'après la légende de son peuple, plus une marionnette portait longtemps un masque, plus elle avait de chances d'obtenir une âme et de ressembler à un véritable humain. Cependant, dans le folklore humain, les masques étaient présentés comme des outils utilisés pour ressusciter les morts, ce qui expliquait la diminution constante des siens.

Cependant, comme elle n'avait aucune envie de devenir humaine, être une poupée lui convenait. En suivant les préceptes du masque, elle avait peu de chances d'échapper à une fin tragique, mais désobéir à sa volonté se révélait difficile.

La gestuelle était un aspect crucial.
Le masque l'obligeait à sourire gentiment pour montrer sa joie, à se prendre la tête dans les mains pour pleurer, à serrer les dents de colère, à plisser les yeux de jalousie et à faire une scène lorsqu'elle était désespérée. Il y avait aussi des gestes caractéristiques, comme lever légèrement les sourcils pour faire face aux autres en présentant le côté gauche de son visage, et lever la main pour exprimer son amour, même si elle devait la baisser après, car c'est en se mordant légèrement la lèvre inférieure qu'elle communiquait ses véritables désirs.

La voix était un autre aspect.
En fonction de la situation, sa voix devait être gaie lorsqu'elle était heureuse, mélodieuse pour exprimer des émotions lyriques, calme et assurée lorsqu'elle prenait position, tendue lorsqu'elle nourrissait de la haine et triste lorsque le chagrin prenait le dessus.

Chose incroyable, elle parvint à vivre ainsi pendant des années, se fondant dans la masse et devenant même dramaturge. Personne ne suspecta jamais qu'elle portait un masque. Cependant, elle ne pouvait s'empêcher de se demander s'il existait un autre type de « masque » dans le monde. Peut-être qu'une personne portant ce type de masque rirait en se vengeant, sourirait en pleurant, bouillonnerait en silence... Et ferait usage de sarcasme le plus calmement du monde.

Naturellement, la volonté du masque l'empêchait de se comporter ainsi, mais il lui était facile de faire agir ainsi les personnages de ses pièces.

Un matin, quelqu'un sonna à la porte, mais ce n'était pas la personne qui effectuait habituellement ses livraisons.
« Chère Mademoiselle Sparkle, est-ce que nous pourrions discuter ? »
« Nous avons lu votre dernière œuvre et nous nous demandons si vous savez quoi que ce soit à propos du "Masque"... »

La fille sans visage réalisa qu'elle devait faire l'objet d'une sorte de malédiction. Pourquoi sinon ne ressentait-elle pas la moindre sensation ? Ses sens de la douleur, du goût et de l'odorat étaient tous intacts, et pourtant elle était incapable d'y réagir. Naturellement, elle ne pouvait ressentir la joie, la colère, la tristesse ou toute autre émotion. Elle ne pouvait qu'observer les réactions d'autres personnes dans diverses situations pour tenter de comprendre leurs sentiments.

« Que ressentiriez-vous si vous buviez une tasse de thé amer ? Comment le boiriez-vous ? »
Bien qu'attaché à la chaise et immobilisé, le sans-abri à gauche fit un geste reconnaissant et hocha la tête. La fille du milieu se mit immédiatement à pleurer et à secouer la tête en signe de refus, tandis que la dame à droite plissa le nez de dégoût.

« Et si vous étiez dans une hutte glacée, avec uniquement cette tasse de thé à la main ? »
Naturellement, l'homme hocha la tête. La fille pleura un moment, puis finit par accepter à contrecœur, tandis que la dame continua de réagir avec dégoût.

Elle continua de poser des questions en changeant de scénarios nuit et jour jusqu'à ce que les personnes interviewées tombent dans les pommes. Elle les renvoyait chez elles et cherchait de nouvelles cibles pour ses « interviews ».

Pendant ce temps, les habitants de la ville faisaient tous le même cauchemar. Ils se retrouvaient enfermés dans un lieu où une jeune fille au visage flou leur posait poliment des questions auxquelles ils n'avaient pas d'autre choix que de répondre. L'une après l'autre, toutes leurs réponses étaient méticuleusement retranscrites sur des masques en papier. Lorsqu'un masque était rempli, un autre prenait sa place.

Un autre cauchemar lui succéda bientôt : les habitants commencèrent à raconter qu'ils voyaient des masques en papier voler au beau milieu de la nuit. Les masques discutaient entre eux, émettant une légère lueur qui finissait par s'estomper, comme des feux de Bengale. Ils apparaissaient chaque nuit, comme s'ils habitaient ici, dans l'ombre de la ville.

Dans un sous-sol sombre, une jeune fille ignorait tout de ce cauchemar. Elle avait collecté suffisamment d'informations, les émotions subtiles des gens, leurs opinions sur différentes choses, pour fabriquer davantage de masques en papier. Elle croyait fermement que même si elle était dépourvue d'émotions, les masques qu'elle créait étaient de chair et de sang et qu'un jour, ils auraient une vie propre.

« Il existe plusieurs versions qui sont populaires à propos de mon origine. » Lorsque Sparkle arriva à la Taverne du fou, elle admit ouvertement que : « Aimer et croire sont deux choses différentes, mais tout le monde préfère croire que l'histoire qu'il aime est vraie. »

« Des mensonges ? Allons, je n'essaie pas de raconter des histoires ou de faire dans le sensationnel... Je m'entraîne à stimuler mon imagination, m'inventant toutes sortes de vies, recherchant l'excitation, puis je fais de mon mieux pour les interprêter, les recréant de toutes pièces pour me freiner une seconde avant que ma bulle d'imagination n'éclate. »

« Franchement, avoir un script est bien loin d'être suffisant. Avant tout, je dois croire sincèrement que le personnage que j'incarne existe vraiment. Puis je dois imaginer les autres histoires dans lesquelles ce personnage apparaîtrait. J'ai toujours besoin d'informations supplémentaires pour rendre leurs motivations logiques et émouvantes. »

« Et ce n'est qu'à ce moment que j'ai l'impression de comprendre l'essence du personnage sans être influencée par d'autres. Après tout, je pourrais rencontrer d'autres Fous, et je ne saurai pas ce qu'ils veulent avant d'apprendre qui ils sont. Parfois, on aime juste l'apparence d'un personnage, et parfois, on veut juste l'incarner pour le plaisir. C'est aussi mon cas. »

« Et bien sûr, il y a ceux pour qui jouer n'est qu'un moyen de gagner leur vie ou ceux qui aspirent à être perçus autrement, dans le but de devenir riche, d'accéder à un statut particulier ou de gagner en pouvoir... Ce que je veux dire, c'est que dans un tel environnement, qui d'autre que moi peut garantir que je ne m'écarterai pas de mon chemin pour devenir le personnage dans l'histoire d'un autre ? Personne ! C'est pour cela que je dois imaginer et me plonger inlassablement dans mon rôle. »

« Non, je ne le nie pas... C'est une véritable addiction chez moi. Plus j'imagine, plus je suis captivée par ces personnages, par les situations merveilleuses et tragiques que je crée pour eux et les émotions qu'ils ressentent dans ces circonstances... »

« Bien sûr, j'ai déjà envisagé par le passé ce genre de vie... Rejoindre une troupe, devenir actrice, me rendre sur des planètes inconnues pour faire des spectacles, créer un personnage portant mon propre nom... Et puis un jour, j'ai eu une illumination ! »

« Qu'y a-t-il de mieux que la scène de ma propre vie pour jouer ? »